J'ai pour habitude de comparer l'apprentissage du calcul mental à l'initiation au tennis de table. Il y a beaucoup de similitudes. Un de nos plus grands didacticiens se moquait de Didier Migaud (le mauvais réflexe : 9 fois 7 : 76). On peut être un esprit brillant mondialement reconnu, mais ne pas savoir, de toute évidence, enseigner les tables de multiplication. Mes paroles n'ont pas plu à un "pédagogue", car, pour distinguer un automatisme d'un réflexe, je m'appuyais sur le jeu à blanc, technique importée de Chine, qui permet d'éviter les mauvais réflexes tout en favorisant de bons automatismes.
«Les nazis ont commencé comme ça en 1930.» m'a-t-il rétorqué. Mes anciens élèves et mes maîtres, donc, des graines de SS, apprécieront.Au moins, en tennis de table, j'ai une certaine expertise reconnue par mes pairs. Voici ma réponse au fanatisme pédagogique de cette personne dont je tairai le nom: Le premier pas pongiste
Le premier pas pongiste est une épreuve sportive créée en 1970 par Jean Devys. Il avait le seul et même objectif : faire découvrir le tennis de table aux plus jeunes.
D'abord des épreuves au niveau local permettaient de sélectionner un joueur sur quatre pour le niveau départemental. Puis, là, on opérait une nouvelle sélection pour disputer la compétition de niveau régional. Chaque ligue pouvait ensuite présenter un ou deux joueurs et joueuses (parfois trois) pour le niveau national, suivant le nombre de participants. En tout, 32 filles et 32 garçons. La FFTT payait les frais de déplacement de tous les participants. Au fil des années, cette compétition se transforma en un véritable championnat de France des écoles primaires. Et c'est en 1991 que fut mis fin à cette formule en interdisant le PPP aux joueurs licenciés et en supprimant le niveau national qui coûtait cher à la fédération. La première année, mon école avait deux filles qualifiées pour disputer la finale nationale. Hélas ! La ligue de Bretagne jugea que cela allait causer des frais inutiles, à la FFTT, pour un club qui en était à sa première affiliation... Et elle ne nous fit pas parvenir nos convocations. Quatre ans plus tard, ces deux mêmes jeunes filles contribuaient à apporter à la Bretagne son premier titre de champion de France dans leur catégorie d'âge (Challenge Ceccaldi), comme le confirme la page 43 de la revue France Tennis de Table. En consultant les divers palmarès, on peut constater que ma petite école à 2 classes de Plouyé, fut assez bien représentée au niveau national, avec même une fois un titre de championne de France. Au printemps 2016, j'ai eu le plaisir de retrouver Jean Devys, 26 ans après, lors des championnats seniors, salle de l'Arena de Brest. Jean Devys est une légende vivante du tennis de table français, l'un de nos plus grands dirigeants. Un challenge par équipes porte son nom. Autrefois, il me taquinait. Il n'y aurait que des filles à Plouyé. En 1990, à Chaumont, enfin, un garçon se qualifia. Il obtint une place d'honneur, 6e. Il était conseillé par une ancienne élève qui avait disputé la finale de 1974 à Poitiers. Une autre ancienne élève de mon école fut classée 8e à Chaumont. Sa maman avait été vice-championne de France, 2e, en 1973 à Meudon... En 1991, fini le PPP pour les jeunes licenciés: Ils disputaient, maintenant, le championnat de France benjamins. À Plouigneau (Finistère), à une trentaine de kilomètres de Plouyé, pas de remboursement de frais de déplacement, Sébastien, le frère de Jean-Marie, montait sur la 3e marche du podium.
CHALLENGE CECCALDI
1974 STRASBOURG
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Retrouvez Jean Devys sur la muraille de Chine. Sommet de la page
FINALE NATIONALE PPP
1973 à MEUDON
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FINALE NATIONALE PPP
1988 à GRENOBLE
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FINALE RÉGIONALE
1990 VANNES
Aujourd'hui, les T.A.P. , de moins en moins gratuits, sont au programme du primaire. Il y a 30 à 50 ans, à Plouyé, on savait occuper les enfants, bénévolement, à la pause méridienne et à la garderie du soir. Il n'y avait pas que le tennis de table. Si tous mes élèves avaient été autorisés à pratiquer la programmation informatique, selon mes méthodes, je ne me contenterais pas de compter mes sportifs champions de France.
Ma programmation était bien plus ambitieuse que Logo ou Scratch ! À quand la résolution de problèmes assistée par ordinateur ?
Les instructions officielles de 1985 ont un peu de quoi effrayer - programmes du cours moyen, par exemple - en ce qu'elles comportent le risque de creuser encore plus les écarts entre les élèves qui possèdent les capacités logiques adéquates et ceux qui ne les possèdent pas.
En effet, ce n'est pas la même planète mathématique.Claude Pair Source Certaines pratiques pédagogiques, dites élitistes, doivent donc être réservées aux héritiers. Il y a du délit d'initié dans l'air... et pas mal d'hypocrisie... En juillet 2022, à Helsinki, avait lieu le congrès international des mathématiciens qui se déroule tous les quatre ans et où sont remises les médailles Fields. Je recommande de suivre l'exposé fait par Kevin Buzzard en séance pleinière. Il explique ce qu'on peut faire et ce qu'on ne peut pas faire avec un ordinateur au plus haut niveau des mathématiques. Voir cette vidéo Plusieurs vies n'auraient pas suffi à Peter Scholze pour vérifier son théorème. Ce fut réalisé par une équipe de mathématiciens. Voir cette preuve Vous constaterez qu'un membre de cette équipe avait déjà pratiqué la résolution de problèmes assistée par ordinateur en 1988, au CE2. Terence Tao était présent les 21 et 23 Mars 2023, à Paris pour recevoir la grande médaille de l'Académie des sciences. Voici que le grand mathématicien intègre l'équipe de Lean. Voir le compte rendu Et maintenant, voici qu'aux Etats Unis on s'intéresse à ces mathématiques du futur: Voir le Rendez-vous de Pasadena (Juin 2024) En 1990, à 10 ans, Joël transposait en langage Pascal les algorithmes de gestion du premier pas pongiste. En 2024, il traduit en langage Lean des algorithmes de géométrie algébrique. Voir Formalisation des catégories dérivées dans Lean/mathlib. Les premiers pas vers la preuve du théorème de Fermat (résolu par Andrew Wiles) commandée à Kevin Buzzard par l’AIM et la NSF. Peut-être, un jour, serais-je pris au sérieux ? La résolution de problèmes assistée par ordinateur dès l'école primaire. Sommet de la page
FINALE DÉPARTEMENTALE
1990 PLONÉVEZ PORZAY
Plusieurs centaines d'inscrits le matin. À la fin de la journée, quatre élèves du même CM2, de la même école, entrent dans le dernier carré. Pas mal, non plus, les résultats de mon ami Jean-Yves Le Mérour de Camaret.
Aucun doute, nous savons distinguer un réflexe d'un automatisme ! Mon école n'était pas la plus riche. Je ne disposais que de deux tables, ou plutôt, deux plateaux en contreplaqué, posés sur des tables d'école. Cette école, c'est quelques titres nationaux, donc, mais aussi et surtout quarante neuf titres départementaux. (21 joueurs différents) Avec de bonnes méthodes et de l'ambition, on peut faire des miracles. Sommet de la page
Les premiers pas
de Jacques SECRÉTIN
Jacques Secrétin est le pongiste français le plus titré. C'est son père, Eugène Secrétin, un instituteur qui pratiquait la pédagogie Freinet qui lui avait fait faire ses premiers pas.
Voici un extrait d'un entretien avec un journaliste que l'on peut voir sur le site de l'INA, une véritable leçon de pédagogie. Eugène Secrétin: - Mon rôle s'est surtout borné à lui apprendre les gestes de base et ce qui est important, les gestes qui sont appris sans faute, pour préserver le perfectionnement dans l'avenir. Le Journaliste: -N'y avait-il pas un conflit à chaque instant entre ce que pensait le père et ce que pensait l'entraîneur ? Eugène Secrétin: -Non. Plus tard. Au début, il n'y a pas beaucoup de contestation possible. Il y a des gestes qui se font de telle façon qu'on ne peut pas contester. Et c'est quand le perfectionnement devient beaucoup plus poussé que là, il y a différentes écoles, différentes opinions. Jacques Secrétin: - C'est grâce aux gestes de base que mon père m'avait appris que j'ai pu avoir un épanouissement au tennis de table. Sommet de la page
Entraîneur diplômé
La première fois que j'ai entendu parler de l'expression «jeu à blanc», ce fut à la fin d'un stage national d'un mois (août 1971) au CREPS de Houlgate. Il était animé par Jacques Secrétin. Son épouse, qu'on peut voir sur la vidéo de l'INA, accompagnait les jeunes filles, dont mes deux élèves qui me firent, à leur retour, le récit de ce stage.
Par la suite, j'ai moi-même participé à plusieurs stages d'entraîneur. Celui d'entraîneur de 2e degré se déroula à l'INS. Charles Roesch, le directeur technique national, avait invité un professeur de Jussieu. Il nous fit un exposé sur l'acte réflexe et un autre sur le sommeil. Ces précieuses informations, je les ai mises en pratique, en tennis de table, mais aussi à l'école dans le cadre de ma vie professionnelle. Quarante ans après, ces savoirs sont vérifiés par l'imagerie cérébrale.
Il faudra attendre les travaux de Karni et coll. (1994), puis ceux des équipes de Stickgold, Ribeiro, et Born, pour prouver que, sans aucun entraînement supplémentaire, les performances cognitives et motrices s'améliorent significativement et de façon durable après une période de sommeil, alors la perturbation du sommeil bloque sélectivement cette consolidation.
Charles Roesch était l'auteur d'un livre important qui allait moderniser l'enseignement de notre sport: «Pré-initiation au tennis de table». Cela veut dire, et c'est essentiel, qu'avant de passer à l'initiation au tennis de table; l'apprentissage des gestes de base; l'enfant y aura été préparé.Pour être plus explicite, j'ai décrit ici, plus en détails la partie immergée de l'iceberg. Après, j'ai encadré de nombreux stages de jeunes, départementaux, régionaux... J'ai participé aussi à la formation de cadres techniques FFTT et UFOLEP. Sommet de la page
Le jeu à blanc
Qu'est-ce que le jeu à blanc ?
Vous en avez une démonstration dans la vidéo «la raquette magique». Jacques Secrétin corrige le geste de défense du revers de son père. Avant d'effectuer le geste technique, à la table, Jacques et Eugène Secrétin miment le geste. Il est tout de même plus facile d'exécuter le geste parfait sans la balle. Quand j'avais commencé à apprendre le tennis de table, avec mes élèves, je ne connaissais rien à la technique de ce sport. J'avais suivi un stage UFOLEP où on m'apprit les gestes de base, sans doute les mêmes que ceux d'Eugène Secrétin. J'avais passé des heures à perfectionner mon premier geste, la poussette du revers et autant, pour l'attaque du coup droit. Là, on m'apprit à bien placer la raquette, et à finir le geste en la plaçant devant le front, comme une visière. Evidemment, cela n'avait rien à voir avec le salut nazi. Ce n'est qu'un repère qui a tout son sens pédagogique. Or ce qui manque aujourd'hui, aux enfants et peut-être à leurs jeunes maîtres, comme je l'ai expliqué à ma page «tables de multiplication», ce sont les repères spatio-temporels, qui les privent de solutions algorithmiques aux problèmes. Lorsque j’étais en activité, l’importance de la représentation spatiale était une conviction. Maintenant, grâce aux travaux de John O'Keefe, May-Britt et Edvard Moser (prix Nobel de Médecine 2014 pour la découverte du "GPS biologique"), c’est une certitude. J’espère que les pédagogues voudront bien en tirer toutes les conséquences ! Jacques Secrétin avoue le point faible de son jeu, la puissance de son coup droit. Enfin, tout dépend de l'adversaire. L'entraîneur fédéral Parmentier en explique la cause. Le geste que lui avait appris son père, sans faute, était parfait avant 1970 (visière). C'est alors que les plaques adhérentes, venant principalement du Japon, révolutionnèrent le tennis de table. C'est au cours d'un stage interrégional, Basse-Normandie vs Bretagne, à Coutances, que j'ai enfin compris comment perfectionner ce geste. Pascal Canteux, l'entraîneur national, prit à part Annie, ma petite élève qui venait de briller au PPP. Il lui plaça correctement la pointe du coude. Avec l'index sur l'avant bras, et le pouce sur le bras, les deux doigts matérialisant un arc, il lui montra l'angle obtus. Et il lui apprit à fermer cet angle, en amenant la main au niveau de l'oreille. Un geste accéléré qui se termine violemment. Contraction (on serre très fort la raquette), décontraction (on relâche la raquette). Un exercice de géométrie et de physique vectorielle concret et pratique, avec des repères pédagogiques. Ensuite, Annie, qui jouait en compétition avec des hommes, en départementale 2, avait un coup droit plus puissant que les armoires bretonnes qu'elle rencontrait. Je peux assurer qu'aucune de mes filles n'avait de complexe d'infériorité féminine. Il est très difficile de corriger le geste bien ancré d'un adulte ou d'un adolescent, même s'il s'appelle Jacques Secrétin. Retarder l'apprentissage de la division et donc des tables de multiplication et de division, n'aurait-il pas une influence sur les mauvaises performances des jeunes Français ? En Chine, on apprend les gestes techniques de base sans faute, au plus tard, vers huit ans. Avant 1990, lorsque les résultats des petits Français étaient encore de bon niveau, on apprenait la division euclidienne, avec deux chiffres au diviseur, au CE2, vers huit ans. Dans l'exécution d'un geste technique, il y a d'abord le déplacement pour se placer sur la trajectoire, et ensuite on doit coordonner cinq axes de rotation, en trois temps, (préparation, exécution, replacement). Jacques Secrétin, comme Pascal Canteux, ne corrigent qu'un seul axe à la fois, le principal. La ligue de Bretagne me confia son robot pour initier le plus possible de jeunes dans le Centre-Bretagne. Il en est passé du monde à Plouyé. Dans les années 1970, c'était une attraction. On venait des trois départements limitrophes, par curiosité, assister à des démonstrations. Ma femme alimentait le robot tandis que je mettais en place les gestes, sans faute. Dès que le geste déraille un peu, on stoppe le robot. On reprend le jeu à blanc et patiemment, on recommence. C'était tout de même moins ennuyeux que mon stage UFOLEP et surtout, beaucoup plus rapide et efficace. Et cette méthode a donné de très bons résultats. Je m'en suis inspiré, pour inventer mon robot de résolution et de correction de divisions euclidiennes. Des repères (dichotomie), et on décompose les obstacles pour ne s'intéresser d'abord, qu'au principal, l'algorithme. Apprendre la technique opératoire de la division était chronophage. Pourquoi était-ce long et difficile ? Tout simplement, parce que les élèves les plus faibles, n'ayant pas encore tout à fait acquis les automatismes de calcul, (tables, soustractions) se perdaient dans le cheminement vers le résultat. C'était un cercle vicieux. Mon programme permet de séparer les difficultés. Le plus important, c'est l'algorithme. On utilise les aides calculatoires à bon escient. En France, on a fait le choix de la médiocrité, reporter ce qui est difficile à plus tard en étalant les difficultés dans le temps. Mon robot, c'est l'inverse. Des exercices concentrés, intenses, mais brefs, avec des repères pédagogiques. On apprend le geste technique de la recherche dichotomique sans faute, dans un temps réduit. Le sommeil fait le reste. Et ainsi, on préserve le perfectionnement dans l'avenir. Quand les programmes scolaires seront plus ambitieux, c'est à dire à la Saint-Glinglin, peut-être pensera-t-on à mon idée du robot qui ne demande qu'à être amélioré. Sommet de la page
ENCORE MIEUX: L'A.L. BRUZ
D'autres pédagogues ont fait bien mieux que moi. Mes élèves n'ont pas atteint les quarts de finale de la coupe d'Europe comme l'amicale laïque de Bruz de mon collègue Michel Hogrel.
Les gestes de base doivent être appris sans faute, pour préserver le perfectionnement dans l'avenir. Sommet de la page |